
C’est une question qui peut paraître facile à traiter dans la mesure ou la plupart des gens savent clairement différencier un noir d’un autre individu mais la question est plus profonde que ça, surtout dans nos sociétés antillaises dites « créoles »: qu’en est-il de la question noire en Martinique?
La société « créole »
La créolisation est le processus par lequel plusieurs cultures finissent par n’en former qu’une après un contact plus ou moins prolongé (de même que pour la langue).
Aux Antilles, ce phénomène a abouti à une société ou les « races » (terme péjoratif) n’existent plus vraiment en tant que telles, mais ou les afro-descendant se retrouvent divisées en plusieurs catégories de phénotypes: « chabin », mûlatres, chapé kouli, nègre etc… Tous ces termes se veulent désigner précisément un individu en fonction du degré de sa couleur de peau, la texture de ses cheveux etc. et pour cause, ils sont pour la plupart issus de la période esclavagiste ou ils permettaient de hiérarchiser les captifs.
On ne peut pas aujourd’hui facilement les occulter car on est depuis petit habitué à être appelé « chabin », « négresse » et compagnie…mais ces termes font tout de même partie des chaines mentales qui nous maintiennent dans un univers colonial omniprésent. Reconnaissons quand même que la plupart du temps ces termes sont utilisés de manière totalement innocente, mais chaque mot à un sens et le sens péjoratif de ces mot a déjà été évoqué dans un article précédent. Cet artiste illustre d’une certaine manière cet état d’esprit à travers son titre:
Le peuple antillais d’aujourd’hui résulte d’un mélange complexe, mais il reste en majorité afro-descendant. Se qualifier de métisses et en faire son identité reviendrait alors selon certaines opinions à être « fier de ce qui nous est arrivé »: l’heure est en effet plutôt à l’affirmation de soi et à la réappropriation de nos racines. La question qui peut se poser est « soyons réalistes, un chabin ou un mulâtre est-il un noir comme un autre »?
Négritude et africanité
En ce qui concerne le terme noir, il désigne aujourd’hui plus le peuple afro-descendant que la couleur noire elle même donc les différents degré de colorations ne sont pas à prendre en considération dans l’émancipation du peuple: l’afro-descendance suffit.
Au cours du siècle dernier, il y a eu un mouvement en particulier qui a marqué le monde noir et un Martiniquais en a été le principal acteur: la Négritude. Pour ne pas trop s’étendre, on se contentera d’une définition d’Aimé Cesaire lui même:
« La Négritude est la simple reconnaissance du fait d’être noir, et l’acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture. » (Liberté 3, pp. 269-270.)
Ces dernières années, on a pu assister à diverses évolutions chez les afro-descendant(e)s: retour au cheveu naturel chez les femmes, de plus en plus de sonorités afro dans la musique, et plus généralement une meilleure acceptation de soi et de son histoire. On parle souvent de revendication et d’affirmation de l’africanité, mais que signifie exactement ce terme?
Étymologiquement , africanité signifie « ce qui caractérise l’Afrique » chez un individu ou un groupe d’individu, « ce qui est propre à l’Afrique » et à nulle part ailleurs dans le monde.
Par exemple, si notre langue à des origines africaines, comme c’est le cas du créole, alors la parler de plus en plus nous permet d’exprimer une part de notre africanité et de celle de notre culture, d’autant plus qu’une grande part de nos traditions tiennent de notre héritage africain.
Le modèle américain
La mondialisation fait qu’énormément de personnes sont influencées par la vision américaine de la question noire mais il faut savoir que la « race noire » y avait été définie dans un acte de loi datant de 1924: le Racial Integrity Act dans lequel il est évoqué qu’une goutte de sang noir ou indien classaient les individus dans la catégorie des gens de couleurs. Cette loi a été abrogée depuis 1967, mais elle a contribué à la condition afro-américaine actuelle et au fait qu’on puisse aujourd’hui parler de communauté noire américaine.
L’article était court par rapport à l’infinité de choses à dire mais on peut conclure en disant que chaque peuple a ses spécificités et ses propres défis à relever. Aux Antilles, la colonisation fait toujours partie de notre quotidien (vocabulaire, « craintes », etc.) et l’un de nos principaux défis est déjà d’en prendre conscience pour pouvoir mettre en place des actions communes pour avancer ensemble dans le même sens car il n’y a qu’en s’unissant que les choses avanceront.
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